Achat d’Art : éducation et émotion

15 août 2022 par Margaux pour Gestion privée 1859

L’histoire d’amour entre Banque Nationale Gestion privée 1859 et l’AGAC (Association des galeries d’art contemporain) – organisatrice de la foire Papier – ne date pas d’hier. De nombreux clients de la banque sont aussi acheteurs, ou collectionneurs d’art. Curieux et avides de conseils, nous nous sommes tournés vers une experte, Jo-Ann Kane, consultante en gestion de collection et conservatrice de la collection de la Banque Nationale, ainsi que membre de la Commission canadienne d’examen des exportations de biens culturels.  

 

Acheter de l’art? Mais pour quoi faire?

Il existe différentes raisons valables d’acquérir une œuvre. D’abord parce qu’on l’aime, ensuite pour l’avoir chez soi, pour soutenir un artiste (et la culture en général), pour investir financièrement, pour enrichir sa collection… Bref, toutes ces raisons sont bonnes, car elles participent au rayonnement de notre culture. Pour Jo-Ann Kane, consultante en gestion de collection et conservatrice de la collection de la Banque Nationale, l’idée n’est pas d’acheter, mais de vouloir vivre avec une œuvre : « J’encourage tout le monde à s’entourer d’Art et à rencontrer les artistes quand cela est possible. On vit avec le produit d’un artiste, alors c’est intéressant de savoir comment il a été pensé ».

À la portée de tous? Oui, mais…

Aujourd’hui, on peut s’offrir une estampe ou un dessin pour moins de 1000$. C’est un bon début pour qui veut faire entrer l’Art dans sa vie. Rapidement, une question va se poser. Celle de la démarche de l’acheteur. Il y a une différence entre acquérir une œuvre pour « vivre avec », et acquérir une œuvre pour entreprendre une collection. « Il existe plusieurs marchés, certains plus pointus, institutionnels pour les collections corporatives et muséales, et dautres, plus accessibles au public », explique l’experte.

De fait, certaines œuvres prisées ne se vendront pas sous votre nez; elles seront certainement réservées aux collections déjà établies et reconnues. Jo-Ann ajoute : « Pour avoir accès à de très très bonnes œuvres, il faut avoir établi des liens avec les galeries et avoir bâti une bonne collection ». Comment en arriver là? En étant bien informé et bien entouré : c’est la clef.

ALORS… Acheter ou collectionner?

On pourrait penser qu’il suffit d’être propriétaire de plusieurs œuvres pour devenir un collectionneur… et que la quantité et la qualité vont mécaniquement bâtir une collection de valeur. Ce n’est pas si simple. « Collectionner, c’est une passion, un énorme investissement de temps et d’argent », explique Jo-Ann Kane. Le collectionneur a un désir d’accumulation, il est en perpétuelle chasse et surtout il a un but, une recherche à mener pour enrichir sa collection. Certaines collections suivent des thèmes précis comme la peinture québécoise des années 60, les femmes en photographie ou même les œuvres considérées comme kitsch. C’est une affaire de professionnels, de passionnés, de gens extrêmement informés et en constante recherche. « Pour la Banque Nationale, acquérir des œuvres dart, cest un investissement, mais cest surtout un soutien pour les artistes et le marché de lart. En faisant lacquisition d’œuvres, en les exposant dans nos différents bureaux et en les prêtant à des institutions muséales, nous participons activement à la démocratisation de lArt et, par le fait même, soutenons directement les artistes et les créateurs », nous explique la conservatrice. Toutefois, on peut avoir des œuvres exceptionnelles sans être collectionneur : « la volonté de s’entourer de beaux objets, c’est très valable aussi! », ajoute-t-elle.

Une quête de savoir et de sens

Acheter ou collectionner, ce n’est pas une question de goût, nous dit notre experte. Si on s’intéresse à l’art, on va vouloir s’instruire, s’informer consciencieusement et très régulièrement sur le marché, les artistes, les mouvements, les périodes… On va recroiser les informations et les sources, s’adresser à plusieurs experts. On va retourner voir des musées que l’on connaît déjà, voyager pour en découvrir de nouveaux… C’est un engagement qui nécessite beaucoup de travail et d’investissement. Ce faisant, on développe son œil, on parvient à comparer, à comprendre, à développer sa sensibilité. À force d’effort et de passion, cette quête a un sens qui va au-delà de l’esthétisme. « L’œuvre nous parle », explique Jo-Ann. Terminons avec quelques conseils pratiques pour entretenir cette recherche permanente.

1. S’informer et enquêter

On parle ici d’éducation, de la recherche quotidienne pour se tenir informé, développer son œil et savoir poser des questions. « Quand on achète un électroménager ou une voiture, on fait beaucoup de recherches : les sites consommateurs, lentourage, les différents autres sites, les notices, etc. Il faut appliquer cette méthode à l’Art », nous dit Jo-Ann sur le ton de l’humour.

2. Avoir plusieurs avis

Aussi bien intentionné que soit votre entourage, vous ne pouvez pas vous reposer entièrement sur lavis dune seule personne, experte ou non. Entourez-vous de spécialistes. Renseignez-vous sur leurs accès dans le marché, leurs accès aux œuvres, leur bagage en histoire de lArt. Essayez de savoir si eux-mêmes voyagent et où ils s’informent.

3. Voir et regarder pour de vrai

Quand on fait entrer une œuvre chez soi, c’est comme un être vivant. Elle a une présence, une voix, une signification. L’acquisition d’une œuvre est une question d’émotion. En allant la voir pour de vrai, vous confirmerez ou non votre connexion avec celle-ci.

4. Commencer aux bons endroits

La foire Papier est le meilleur endroit pour commencer votre quête. Rapprochez-vous de l’AGAC, et suivez ses événements et ses nouvelles.

En conclusion

Tous les moyens sont bons pour soutenir le marché de l’art canadien. On peut très bien vouloir être entouré de belles choses chez soi. Si l’on veut devenir collectionneur, il faut du temps, de l’énergie, de la patience, et surtout des connaissances… Ça demande beaucoup de passion et de curiosité. Et cette ouverture est toujours très satisfaisante, comme le souligne notre invitée : « Collectionner, c’est une chasse aux papillons, je suis toujours aussi heureuse de ma première acquisition. »